vendredi 31 mars 2006

Lecture...


C 'est une consolation pour moi de savoir qu'au dessus de la buée et de la fange des bas-fonds humains, il existe une humanité plus haute et plus claire, sans doute très réduite en nombre ( car tout ce qui est éminent est rare par essence) ; on en fait partie, non pas parce qu'on est plus doué ou plus vertueux ou plus héroïque ou plus aimant que les hommes d' en bas, mais parce qu'on est plus froid, plus clair, plus lucide, plus solitaire, parce qu'on a un regard qui porte plus loin, parce qu'on supporte la solitude, qu'on la préfère, qu'on la réclame, comme un bonheur, comme un privilège, comme la condition même de l' existence, parce qu'on vit parmi les nuées et les éclairs comme parmi ses pairs, de même avec les rayons du soleil, les gouttes de rosée, les flocons de neige, tout ce qui nécessairement vient d' en haut et qui ne peut se déplacer que du haut vers le bas. Les aspirations vers les hauteurs ne sont pas les nôtres. _ Les héros, les martyrs, les génies et les enthousiastes ne nous semblent pas assez tranquilles, assez patients, assez fins, assez froids, assez lent.
Nietzsche. 1885

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